
Tendances en matière de sélection des risques accélérée :
Un aperçu du marché canadien
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Qu’est-ce que la sélection des risques accélérée?
La sélection des risques accélérée est un programme dont les exigences traditionnelles de sélection des risques d’assurance vie ne s’appliquent pas pour un sous-ensemble de proposants qui répondent aux exigences favorables en matière de risque dans le cadre d’un processus de sélection des risques complet. Cependant, même en suivant cette définition, la mise en place de la sélection des risques accélérée peut varier d’un assureur à l’autre. Par exemple :
- Les assureurs peuvent utiliser différents types d’analytiques en sélection des risques, notamment les modèles sur la propension au tabagisme et sur la fausse déclaration de l’indice de masse corporelle (IMC), en plus des règles de sélection des risques traditionnelles.
- En général, si un proposant « réussit » à passer les modèles, une police peut être émise sans besoin de tests de laboratoire et de services paramédicaux. Cependant, certains assureurs utilisent aussi les Rapports du médecin traitant (RMT) pour atténuer l’incidence de la renonciation des tests de laboratoire et des signes vitaux.
- Si les modèles de sélection des risques identifient une préoccupation, le proposant sera ciblé pour remplir des exigences de sélection des risques supplémentaires, ce qui revient à une approche de sélection des risques complète traditionnelle.
- Les proposants peuvent également être choisis au hasard pour un échantillon pour des exigences de sélection des risques supplémentaires. Cette méthode permet aux assureurs de mesurer le rendement de leurs programmes de sélection des risques accélérée.
Indépendamment des nuances dans la façon dont la sélection des risques accélérée est mise en œuvre, l’objectif reste le même pour tous les assureurs : réduire le nombre d’exigences recueillies afin d’améliorer le processus pour le client, le conseiller et l’assureur.
Par souci d’uniformité, le présent article utilise la définition de la sélection des risques accélérée de Munich Re : programme où des régions de montants d’assurance et d’âges à l’émission sont admissibles à la sélection sans test de laboratoire, utilisent l’analytique en sélection des risques et incluent un programme d’échantillonnage.

Historique et état actuel de la sélection des risques accélérée au Canada
Les programmes de sélection des risques accélérée sont une pratique en pleine expansion au Canada et la pandémie de 2020 a propulsé leur développement. En 2017, un seul assureur canadien offrait un programme de sélection des risques accélérée. En 2023, ce nombre avait augmenté à 10 assureurs et d’autres compagnies chercheront à concevoir leurs propres programmes à l’avenir. Pour les clients, la disponibilité croissante des programmes de sélection des risques accélérée s’est traduite par des améliorations claires en offrant une expérience d’achat plus rapide et moins invasive à la majorité des proposants d’assurance vie.
Pour les assureurs, la mise en œuvre de programmes de sélection des risques accélérée a permis d’offrir une expérience d’achat améliorée à un plus grand nombre de clients grâce à une augmentation des limites de sélection des risques sans test de laboratoires. Comme l’illustre la figure 1, les programmes de sélection des risques accélérée ont permis aux assureurs d’augmenter les limites de sélection des risques sans test de laboratoires : pour l’âge à l’émission de 45 ans, la limite maximale a augmenté de 1 000 000 $ en 2017 à 5 000 000 $ en 2023. Au cours de la même période, le pourcentage sans test de laboratoires par montant d’assurance a d’ailleurs augmenté de 29 % à 54 % en assurance vie individuelle.

L’augmentation du pourcentage sans test de laboratoires au cours de ces mêmes années se reflète également dans la réduction du temps de placement pour les propositions d’assurance vie individuelle faisant l’objet d’une sélection des risques complète, comme il est indiqué à la figure 2. Cette augmentation n’est toutefois pas sans risque. Par exemple, l’une des préoccupations liées à l’assouplissement des exigences de sélection des risques est l’antisélection, lorsque les proposants ou les conseillers présentent une proposition d’assurance en gardant pour eux des données sur leur santé ou leur mode de vie, car ils savent que des tests de laboratoire ne seront probablement pas demandés.
Toutefois, la figure 2 montre également que les données liées aux placements, y compris les taux de placement, les propositions émises standard, les propositions refusées ou différées, ainsi que les pertes, sont demeurées stables malgré l’élimination de l’exigence de tests de laboratoire pour la majorité des polices. Il s’agit d’une indication possible que les mesures d’atténuation des risques mises en place par les assureurs ont permis de déterminer les bons risques.

Les mesures d’atténuation des risques pour les assureurs prennent diverses formes. Par exemple, les progrès des technologies informatiques et de l’intelligence artificielle ont propulsé le développement des analytiques en sélection des risques pour l’assurance. Les assureurs intègrent de plus en plus de modèles prédictifs dans leurs processus de sélection des risques, que ce soit pour le triage ou la prise de décision. Au Canada, il s’agit principalement de modèles relatifs aux fausses déclarations, qui permettent de repérer les proposants ayant fait une fausse déclaration qui, autrement, entraîneraient des différences importantes dans les résultats de sélection des risques. Les modèles relatifs aux fausses déclarations sur le tabagisme et l’IMC sont actuellement la forme la plus courante d’analytiques en sélection des risques pour l’ensemble des programmes de sélection des risques accélérée au Canada. Tous les assureurs qui offrent des programmes de sélection des risques accélérée possèdent déjà au moins un de ces modèles, ou cherchent à ajouter d’autres modèles pour renforcer leurs capacités en sélection des risques accélérée.
La mise en œuvre d’analytiques en sélection des risques a également permis aux assureurs d’introduire des échantillons dans leurs programmes de sélection des risques accélérée. Les échantillons sont des dossiers dans en sélection des risques sans test de laboratoire qui sont sélectionnés pour faire l’objet d’exigences supplémentaires. Ils peuvent comprendre des tests de laboratoire, des signes vitaux ou la production d’un RMT spécial :
Les proposants faisant l’objet d’un échantillon aléatoire sont sélectionnés au hasard ou par ordre chronologique. Les échantillons peuvent être utilisés par les assureurs pour comprendre l’incidence de leur programme de sélection des risques accélérée sur leurs décisions de sélection des risques.
Les proposants faisant l’objet d’un échantillon ciblé sont sélectionnés par les processus d’analytiques en sélection des risques et permettent aux assureurs d’assouplir les exigences de sélection des risques tout en continuant de faire l’objet d’un examen plus approfondi, au besoin.
Les assureurs ont recours à l’un ou aux deux types d’échantillons pour améliorer leurs capacités de surveillance et de sélection des risques. Au Canada, les échantillons sont le plus souvent appliqués pour les montants d’assurance supérieurs à 500 000 $, à des niveaux correspondant à environ 10 % des polices soumises pour les échantillons aléatoires et à 14 % pour les échantillons ciblés.
La figure 3 montre que les participants du Sondage sur l’assurance individuelle de Munich Re ont considérablement augmenté leur utilisation des analytiques en sélection des risques et leurs échantillons au cours des cinq dernières années. Les assureurs affinent et améliorent continuellement les niveaux d’échantillon du programme de sélection des risques accélérée pour accroître la confiance à l’égard de leurs décisions , en veillant à concilier ces besoins avec les expériences des clients et des conseillers.

Perspectives : l’avenir de la sélection des risques accélérée
Déviation de la mortalité
Une préoccupation importante et persistante à l’échelle de l’industrie est la déviation de la mortalité, soit la détérioration de la mortalité causée par l’élimination des exigences traditionnelles de sélection des risques dans le processus de sélection des risques. Ce risque s’explique par le fait que l’élimination des exigences relatives aux tests de laboratoire dans le cadre des programmes de sélection des risques accélérée présente un risque d’attribuer la mauvaise surprime aux proposants ou d’émettre des polices qui auraient dû être refusées. Comme la sélection des risques accélérée est de plus en plus répandue, il est extrêmement important de comprendre la déviation de la mortalité et la façon dont elle peut être atténuée et tarifée en conséquence.
Les compagnies doivent s’efforcer de surveiller de manière efficace et continue la déviation de la mortalité dans le cadre des activités de sélection des risques accélérée, en gardant à l’esprit que la capacité de recueillir et de communiquer des données sur la méthode de sélection des risques suivie pour chaque police constitue un élément essentiel de ces efforts de surveillance. À l’heure actuelle, les assureurs canadiens ne suivent pas d’approche universelle pour calculer la déviation, mais Munich Re travaille activement avec les clients pour déterminer la meilleure méthode pour calculer la déviation dans le cadre de sélection des risques des clients.
Pertes
Les pertes représentent la grande catégorie des propositions qui n’ont pas été retenues par la proposant avant la décision finale, qui ont été fermées parce qu’elles étaient incomplètes ou qui n’ont pas été achetées par le proposant après la décision finale. Comprendre le détail des pertes peut aider les assureurs à mieux comprendre l’efficacité de leur programme de sélection des risques accélérée. En général, les pertes sont moins élevées pour les propositions dont l’approbation n’a nécessité aucune preuve supplémentaire en sélection des risques accélérée, et sont plus élevées pour les échantillons, ce qui laisse entendre que les pertes sont influencées par la quantité de preuves recueillies.
Des pertes supérieures à la moyenne dans les échantillons peuvent indiquer que le programme de sélection des risques accélérée d’une compagnie présente des risques défavorables de manière disproportionnée et que les pertes subséquentes sont sélectives. Il y a une perte sélective lorsqu’un client renonce à sa proposition d’assurance précisément pour éviter de fournir à l’assureur une preuve qui aura une incidence négative sur son admissibilité à l’assurance ou sa prime. Il a été observé que les pertes sont plus élevées pour les échantillons ciblés que pour les échantillons aléatoires, ce qui témoigne de la nature sélective des pertes et de l’incidence d’une fausse déclaration sous-jacente. Cela signifie en outre que les résultats des échantillons aléatoires ne sont plus véritablement aléatoires, car ils représentent un échantillon de proposants qui étaient disposés à fournir des preuves.
Priorités et défis
Les priorités et les défis en sélection des risques accélérée peuvent varier selon la taille de l’assureur et la maturité de son programme de sélection des risques accélérée.
Pour les assureurs qui en sont aux premières étapes de la conception d’un programme de sélection des risques accélérée, les priorités portent sur l’élaboration et la mise en œuvre d’analytiques en sélection des risques. Dans cette optique, les compagnies doivent s’assurer qu’elles ont accès à suffisamment de données (c.-à-d. la sélection des risques, l’en vigueur et l’expérience) et que ces données sont accessibles dans un format numérique qui peut être intégré à leurs systèmes actuels. Cependant, c’est aussi là que se situent les principaux défis pour ces compagnies, car la numérisation, l’intégration des données et l’élaboration de modèles exigent beaucoup de ressources.
Les assureurs qui ont des programmes de sélection des risques accélérée plus matures sont susceptibles de disposer de plus de données et d’expérience, ce qui leur permet de mettre plutôt l’accent sur l’amélioration de leurs capacités d’analyse en sélection des risques. Voici certaines des améliorations qui pourraient être apportées :
Limiter les biais et améliorer la surveillance des modèles existants
Élaborer la prochaine génération de modèles
Retirer les modèles qui n’ajoutent pas suffisamment de valeur
Délaisser les échantillons aléatoires au profit des échantillons ciblés
Sources de données
À l’échelle de l’industrie, les assureurs cherchent à tirer parti des sources de données nouvelles et existantes, mais la disponibilité et la qualité de ces données présentent des défis pour le secteur canadien de l’assurance. Une amélioration qui serait utile est l’intégration de nouvelles sources de données dans la sélection des risques, comme aux États-Unis, où l’on utilise de plus en plus des données numériques sur la santé liées aux renseignements sur les antécédents médicaux des proposants.
Grâce à notre expérience directe aux États-Unis et à des analyses préliminaires des données disponibles au Canada, nous avons examiné la valeur protectrice de certaines sources de données de tiers, comme les laboratoires cliniques et les dossiers de santé électroniques. Ces sources de données peuvent offrir une solution de rechange aux tests de laboratoire d’assurance traditionnels, changeant ainsi notre approche de l’évaluation du risque. Par exemple, certaines de ces sources de données offrent une vue d’ensemble de l’état de santé du proposant, ce qui permet de déceler les tendances. Elles pourraient aussi fournir d’autres renseignements qui ne sont pas facilement obtenus par l’intermédiaire de tests de laboratoire d’assurance, comme des formules sanguines complètes.
Ces nouvelles sources de données pourraient être utilisées dans le cadre de la sélection des risques pour améliorer l’expérience client grâce à des décisions plus rapides, sans porter atteinte à l’expérience de la mortalité.
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